Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Journal d'un apostat
Journal d'un apostat
Publicité
Journal d'un apostat
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
29 juin 2007

Lettre de Louis Chagnon

Lettre de Louis Chagnon,

professeur en procès pour avoir rappelé des faits historiques sur Mahomet

Professeur d’histoire et de géographie, mon cours sur le monde musulman avait provoqué un « tollé » de... sept personnes. Cette ultraminorité agissante m’a accusé de « racisme antimusulman » et a saisi le Mrap et la Ligue des droits de l’homme, qui me poursuivent aujourd’hui en justice.

Que mon modeste cours de 5e ait pu entraîner de telles réactions prouve qu’il a soulevé un problème sensible : comment enseigner le monde musulman dans le cadre d’une critique historique, au sein d’un établissement laïque ? Le professeur d’histoire contraint par les programmes d’enseigner le monde musulman est devant un dilemme : doit-il cacher des faits historiques à ses élèves sous le prétexte de respecter la religion musulmane ou doit-il respecter la réalité historique au risque de heurter des convictions religieuses ? Pour ma part, j’estime que le respect commence par la réalité historique, même si elle peut paraître déplaisante.

Il y a encore quelques années, le professeur pouvait éveiller l’esprit critique de ses élèves sur l’islam, il est vrai sur un seul thème, celui de la condition féminine. Dans les fiches pédagogiques du CRDP (Centre régional de documents pédagogiques) de l’Académie de Lyon, des passages du Coran se rapportant à ce sujet étaient cités : sourate IV, verset 38 : « Les hommes sont supérieurs aux femmes (...). Les femmes vertueuses sont obéissantes et soumises (...), vous réprimanderez celles dont vous aurez à craindre l’inobéissance (...), vous les battrez (...) ».

Aujourd’hui, la condition féminine est passée à la trappe, vous seriez bien en peine de trouver un extrait du Coran pour l’évoquer dans les fiches du CRDP ou dans le manuel scolaire utilisé au collège (1).

Dans ce manuel, vous ne trouverez aucune référence aux pillages des caravanes de La Mecque, au massacre des juifs de la tribu des Quraizah ou aux versets du Coran sur les chrétiens. Les seuls versets cités sont particulièrement choisis pour éviter tout aspect critique. Il est bien entendu inconcevable de montrer les musulmans comme des esclavagistes, c’est pourtant une réalité historique, la « culpabilité » de l’esclavage ne devant être supportée que par les Occidentaux (2).

La seule représentation des guerriers musulmans dans ce manuel exclut toute violence, ceux-ci ne se battent pas mais brandissent des bannières et jouent de la trompette. Il y a bien un texte de Tabary concernant la bataille de Qadisiyya en 637 entre les Perses et les musulmans, mais il traite surtout des éléphants de combat des Perses. D’ailleurs, une des deux questions posées aux élèves est : « Comment les Arabes parviennent-ils à faire fuir les éléphants ? » Conclusion : les collégiens retiendront que les guerriers musulmans jouaient de la trompette et combattaient des éléphants ! En fait, ce manuel est d’une suavité confondante sur ce sujet et finit par ne plus respecter la réalité historique.

La présentation de l’empire musulman est complètement tronquée, si le manuel rappelle l’existence du statut de « protégé » des chrétiens et des juifs qui, moyennant un impôt, pouvaient garder leur religion, l’élève ne saura jamais que le paiement de cet impôt pouvait être accompagné d’humiliations publiques ni que l’esclavage ou la mort sanctionnait le refus de son paiement. La conclusion du paragraphe est assez effarante : « L’Empire arabe devient ainsi un Empire musulman, où les différences entre vainqueurs ou vaincus disparaissent dans l’unité de la même foi ». Si l’on en croit ce manuel, tous les chrétiens et les juifs seraient devenus musulmans.

Par contre, l’Occident chrétien est présenté d’une autre façon dans le manuel scolaire : la représentation des chevaliers chrétiens de la Reconquista est beaucoup moins pacifique, ils se battent, un guerrier musulman est même tué d’une lance. Quant aux croisades, on atteint des sommets : « Elles ont développé chez les musulmans l’image d’un Occident agressif », est-il écrit. Parce que la conquête arabo-musulmane n’a jamais eu de caractère agressif ? Bien sûr puisque les guerriers musulmans étaient des mélomanes pourchassant des éléphants ! L’Histoire tourne ? la farce !

Est-ce que le manuel cache le masacre de la Saint-Barthélemy ? Bien évidemment non, les collégiens ont même droit à une gravure représentant cet événement, montrant donc des meurtres d’hommes, de femmes et d’enfants par des catholiques. Cela ne choque personne et aucun parent ne crie au racisme anticatholique. Les représentations de la violence ne concernent donc que le monde occidental.

Nous en arrivons à une vision parfaitement manichéenne et fausse de l’histoire : le positif relève des civilisations extra-européennes et le négatif relève toujours de l’Occident. Est-ce là de l’esprit critique ? Est-ce ainsi que l’on doit former les futurs citoyens ? Les professeurs doivent-ils inculquer aux élèves le mépris de la civilisation qui a inventé la démocratie ? Pour ma part, je me proclame fier d’appartenir à la culture occidentale où sont nés les droits fondamentaux du citoyen et que l’on ne compte pas sur moi pour transmettre le mépris de cet immense héritage culturel et de ses valeurs. Ces valeurs ne sont d’ailleurs plus considérées que comme « prétendues » universelles dans « 4e histoire, géographie, éducation civique, aide à la mise en oeuvre des programmes », du Centre régional de documentation pédagogique de l’Académie de Versailles.

La violence fait partie de l’histoire de l’Empire musulman, l’islam est né dans la violence, c’est un fait historique, le nier ne fait qu’encourager l’islamisme le plus radical puisque l’esprit critique est par définition une garantie contre les excès. La critique doit s’exercer sur l’islam comme sur toute autre religion ou événement historique. Mahomet doit être un sujet d’étude comme les autres. Le communautarisme religieux n’a pas à imposer sa lecture de l’histoire.

Le « politiquement correct » incompatible avec la déontologie de l’historien doit être banni des manuels scolaires, il faut appeler les choses par leur nom (un pillage est un vol et un massacre est un crime), c’est la condition première pour un enseignement digne de ce nom. Le professeur d’histoire est là pour transmettre la réalité historique, si gênante soit-elle.

L’enseignant doit être libre de ses propos sans aucune tutelle politique ou religieuse, ce qui d’ailleurs est dans les textes de lois. Aucune censure religieuse n’est justifiable, quelle que soit la confession religieuse des élèves, qu’un enseignant dans une école laïque n’a d’ailleurs pas à connaître. Un professeur d’histoire n’est pas un professeur de mythes ou de contes de fées, il doit encore moins être au service d’un credo religieux.

Malheureusement, cela n’est pas la réalité. Mon affaire montre clairement que l’enseignant est dorénavant sous surveillance politico-religieuse. Faut-il que l’enseignant donne ses cours en se demandant à chaque fois si telle ou telle phrase ne le conduira pas devant le tribunal correctionnel ? Mes collègues de français doivent avoir des sueurs froides lorsqu’ils font étudier Le Cid à leurs élèves et mes collègues d’italien ne s’aventureront pas à faire étudier L’Enfer de Dante où Mahomet est décrit éventré. Ne parlons pas du Mahomet ou le fanatisme de Voltaire...

Il est indispensable que les professeurs soient protégés des poursuites judiciaires en ce qui concerne le contenu de leurs cours, les problèmes pédagogiques doivent se régler au sein de l’Education nationale et non devant les tribunaux, à moins de vouloir faire fuir les candidats au métier d’enseignant.

La citoyenneté et la religion musulmane ne peuvent s’entendre que par la distinction du spirituel et du temporel, relater des faits historiques établis sur Mahomet ou le monde musulman n’a rien à voir avec un quelconque jugement de valeur sur le message spirituel de l’islam. Assumer son histoire et accepter la critique de sa religion font partie des règles de vie dans une démocratie. Une société qui remplace le débat par les tribunaux est une société malade. La foi religieuse doit rester dans la sphère privée et ne pas être une arme politique ou un moyen de pression.

Force est de constater qu’aujourd’hui la démocratie en France est bel et bien en danger : qu’un citoyen-enseignant puisse être traîné devant les tribunaux pour avoir relaté des faits et gestes d’un personnage mort il y a quatorze siècles le prouve assez.

Le message est clair en direction de tout le corps enseignant : cela est un avertissement et celui ou celle qui ne rentrera pas dans le rang du « politiquement correct » subira le même sort. Cela porte un nom : le terrorisme intellectuel.

Louis Chagnon, 6 février 2004

(1) Bordas, Histoire-géographie 5e, édition 1997.

(2) Les ouvrages de Jacques Heers, Les Barbaresques, et Les Négriers en terres d’Islam, (Perrin).


Louis Chagnon, 49 ans, professeur certifié d’histoire et de géographie, est poursuivi en justice par le Mrap et la Ligue des droits de l’homme pour avoir dit à ses élèves de 5e du collège Georges-Pompidou de Courbevoie (Hauts-de-Seine), lors d’un cours sur l’histoire de l’islam, qu’à une certaine époque de sa vie « Mahomet va se transformer en voleur et en assassin ». Un inspecteur pédagogique a jugé ces propos « racistes ». L’enseignant est passé dernièrement en conseil de discipline, qui lui a infligé un blâme. Après révélation de cette affaire, Le Figaro a reçu de très nombreuses lettres de soutien, notamment d’enseignants, à M. Chagnon. Un comité de soutien a également été créé sur Internet (www.laic.info), qui entend défendre la laïcité à l’école.

mardi 10 février 2004

Voir aussi gaucherepublicaine.org

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité